lundi 11 décembre 2017

Aucassin, Nicolette et Hafiz

Chiara Mezzalama, ARySQUE et Veronika Ovchinnikova

Autant le dire tout de suite : Dimanche au Jardin partagé Truillot, rien ne s’est passé comme prévu. La pluie de la nuit et du matin avait transformé la terre sèche en boue collante, les trois barnums sensés nous abriter sont devenus un immense parasol de forain, la tempête rendait impossible l’installation que nous avions prévue et un dégât des eaux clouait chez elle l’une de nos comédiennes…

J'étais donc un brin tendue, voire égarée, en arrivant au jardin…  
Puis Demba a installé le parapluie géant, Veronika est arrivée avec son accordéon et Chiara s’est réjouie d’avoir quelques clochettes à se mettre au poignet pour tenir son rôle de Merliflette. 
On s’est dit qu’on se lancerait quand même. 
Du coup, Alexandre a sorti le micro, Cyril a dit « Pas de problème, je joue Aucassin » et Polska a pris le rôle de Nicolette. Les premiers enfants étaient arrivés alors on a lu à 4 voix Le Fabuleux amour d’Aucassin et Nicolette. Tout le monde a ri et je pouffais dans mon écharpe en essayant de continuer à lire mon texte délavé par une chute fâcheuse dans une flaque d’eau boueuse. 


C’était un moment délicieux et les artistes qui décoraient les pots pour les semis-cadeaux de La Clochette juste à côté de nous, ont rapidement levé le nez pour nous regarder raconter cette histoire abracadabrante d’une île où l’on accueille les naufragés à bras ouverts et où l’on se bombarde de légumes quand on se fait la guerre. 
Il faisait un froid glacial et humide et nous n’étions qu’une poignée d’irréductibles, transis mais finalement ravis d’être là, à découvrir la sélection de livres Jeunesse qui parlent d’exil et de biodiversité dans une ambiance pleine de chaleur, elle.


Pour l’écriture des Fleurs d’exils, soyons honnêtes : aucun questionnaire n’a été rempli. Comment aurions-nous pu, debout, les mains collées sur les gobelets en plastique remplis de thé ou de café chaud ? 
Pourtant, des fleurs d’exils, nous en avons cueillies… et des plus belles.

Hafiz El Sudani et ARySQUE

Parce que deux jours avant cet après-midi-là, nous avons appris la venue d’un invité-surprise : Hafiz El Sudani, exilé soudanais. Il était accompagné d’Audrey, du Collectif Dessins sans papiers. Hafiz était venu dédicacer le récit de son voyage depuis le Soudan, raconté dessin après dessin pendant les ateliers Dessins sans papiers qui tournent dans les centres d’accueil… Waow ! Quels dessins !
Surtout, Hafiz avait, en plus des exemplaires de son livre, apporté pour notre projet, le dessin de ses fleurs d’exils. Elles ne sont pas de celles que nous avons racontées jusqu’ici : celles-ci n’existent, je crois, que dans son âme de voyageur et elles sont magnifiques !

©Hafiz El Sudani

©Hafiz El Sudani

Alors ce matin, après mon petit-déjeuner, je me suis plongée dans le livre d’Hafiz El Sudani et j’en ai trouvé d’autres, des fleurs d’exils : 

©Hafiz El Sudani

Un vieux baobab, d'abord
«Ce baobab est un arbre très ancien. Il a le tronc creux, En hiver, on le remplit d’eau et on revient la chercher en été pour le désaltérer. Ces arbres peuvent vivre plus de 500 ans. En Afrique, ce sont des symboles de force et de longévité.»

Des Zaharate al khaleej
«La vie est tranquille au foyer (…) Moi, je descends dans le jardin. Il y a une vigne qui grimpe au mur et un petit arbre couvert de fleurs rouges. Quand je les regarde, je pense au jardin de ma maison au Soudan. C’est moi qui m’en occupais. J’avais planté des « zaharate al khaleej ». On les appelle des « roses » ici.»

Merci Hafiz. 
Nous sommes tous plus riches d’avoir respiré le parfum de tes fleurs d’exils.
Bienvenu chez nous et bienvenu au Jardin partagé Truillot. 

ARySQUE

samedi 9 décembre 2017

Les livres des Fleurs d'exils



Demain dimanche, à l'occasion du Noël vert et solidaire du Jardin partagé Truillot, nous tiendrons notre troisième atelier Fleurs d'exils.
Après une session à la librairie La Tête ailleurs en novembre où nous avions déjà lu à trois voix des bribes de textes parlant de plantes, rendez-vous demain au jardin avec les enfants.

Veronika Ovchinnikova rejoindra notre petite équipe de lectrices : nous serons donc quatre pour vous lire quelques extraits d'un très joli livre, le Fabuleux amour d'Aucassin et Nicolette, tiré d'une chantefable picarde.
Nous en profiterons aussi pour vous présenter quelques ouvrages Jeunesse qui parlent exil et/ou biodiversité et qu'on a choisis parce qu'on les aimait ou parce que la librairie La Tête ailleurs nous les a conseillés.

Egalement au programme de ce Noël vert et solidaire, la fabrication de semis-cadeaux pour les sans-abris, la découverte du Collectif Dessins sans papiers et du très joli livre d'Hafiz Al Sudani créé avec eux, et un goûter à partager… Entre autres choses.

A demain.
ARySQUE

samedi 2 décembre 2017

Des fleurs d'exils en salade de fruits



Le 12 novembre dernier à la librairie La Tête ailleurs, il y avait M., S., F., A., B. et ceux qui n’ont pas dit leur nom. C'était un atelier Fleurs d'exils et chacun a raconté la sienne. Le texte qui suit est éhontément copié sur leur récit, parfois même mot pour mot. 
Je ne doute donc pas que les invités du 12 novembre retrouveront ici des bribes de leur histoire et même leurs propres mots. Ils me pardonneront ce plagiat: nous jouions ce jour-là au jeu du cadavre exquis.
De plus, pour le confort de la narration et le plaisir d'écrire, j’ai ajouté quelques transitions de mon cru, j'ai même parfois brodé sans aucune gêne. Alors, si finalement leur souvenir n'a pas grand chose à voir avec ce récit-là, qu’ils me pardonnent aussi : j’ai composé avec leurs textes, une histoire en salade de fruits. La voici :

" Nous allions souvent dans les prés voisins cueillir de la mâche sauvage. J’aimais surtout celui où poussait le chêne. Le ciel autour de lui était très bleu et l’on entendait des rires au loin. Deux chats s’y promenaient.

Quand on rentrait de notre cueillette tout en discutant de la longue séance d’épluchage et de nettoyage qui nous attendait, j’admirais les glaïeuls, fiers et dressés, même quand il pleuvait à seau et que le vent faisait taper les volets. Ca et là flottaient les pétales froissés des coquelicots, exactement comme faisaient ceux qui poussaient derrière le grillage de mon école. 
Les bons jours, un troisième chat grimpait dans le platane de la basse-cour et affolait les poules qui partaient en débandade. Elles provoquaient un tel raffut que la balançoire protestait à son tour par des grincements furieux.

L’odeur sèche du buis qui montait dans la chaleur du soleil d’été marquait l’entrée du jardin. 
Juste avant d’atteindre les marches du perron, nous passions devant un petit buisson — « Un corête du Japon », me répétait-on souvent pour être bien certain que je ne l’oublierai pas—. Il était exactement de ma taille et je ne pouvais pas m’empêcher de le toucher : ses feuilles vert tendre, dentelées, douces et légères, ses fleurs comme de petits pompons jaunes d’or tout ronds et d’une couleur éclatante…

Au fond du jardin, mon frère s’était hissé à la cime du magnolia sans craindre ses branches, cassantes comme du verre. D'en haut, il observait les allées-venues de la maison et faisait provision des fruits fermes de son arbre-refuge. Dans quelques minutes, il les aurait transformées en grenades et exercerait son adresse au lance-pierres, en semant la terreur dans la communauté de lézards.


Prochain rendez-vous des ateliers Fleurs d’exils, le 10 décembre à 15 h, à l'occasion du Noël solidaire au Jardin partagé Truillot. Je vous en dis plus dans la semaine.  

ARySQUE


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